Le Centre réformé de Charmey sera vendu

Le Centre réformé de Charmey / DR
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Le Centre réformé de Charmey
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Le Centre réformé de Charmey sera vendu

Le Parlement de l’Eglise réformée du canton de Fribourg a décidé de renoncer à son droit de préemption, lors de son Synode du 27 mai. Le complexe sera racheté par Ubic Group et les travaux de rénovation débuteront mi-juin, pour une réouverture prévue au premier trimestre 2026.

C’est une longue période de perfusion qui s’est achevée ce 27 mai. Construit en 1972 par l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg (EERF), le Centre réformé de Charmey se voulait le «chalet de la jeunesse francophone» - un lieu pour organiser des camps et des week-ends. Après moult soubresauts, son Synode (législatif) a décidé de s’en séparer définitivement, en renonçant à faire valoir son droit de préemption à l’occasion du contrat de vente en passe d’être signé avec Ubic Group, déjà à la tête des remontées mécaniques Télé-Charmey. 

Géré pendant trois décennies par l’Eglise cantonale, le complexe réunissant aujourd’hui quatre bâtiments a été cédé à une première fondation en 2006. Dans l’acte de donation, il était cependant spécifié que la fondation s’engageait à ce que le Centre «continue d’être exploité dans une tradition et un esprit réformés». 

Derniers sursauts

En octobre 2021, suite aux difficultés particulières rencontrées par la crise du Covid, le Conseil de fondation annonce la fermeture du Centre et ses membres démissionnent dans la foulée. Différentes paroisses réformées manifestent alors leur volonté de s’engager pour sa survie, consentant à des prêts à hauteur de 95'000 francs. Un nouveau Conseil de fondation est mis sur pied et celui-ci engage un partenariat avec la société Ubic Group, comprenant la gestion du complexe ainsi qu’un important projet de transformation budgétisé à 3,7 millions. 

En attendant le début des travaux, la Fondation signe un contrat avec l’Etat de Fribourg pour accueillir dès l’automne 2022 des réfugiés (prioritairement ukrainiens) dans une partie du Centre –  contrat qui a pris fin au 1e avril dernier. «Cela faisait tout à fait sens avec l’esprit d’une Eglise, mais d’un point de vue comptable, ce loyer de 18'000 fr mensuel nous a aussi permis d’équilibrer nos charges et de maintenir des exercices positifs», détaille, ce mardi devant le Synode, Adrien de Steiger, président du Conseil de fondation. 

«Gueule de bois»

Pour autant, les nouvelles ne sont pas bonnes. «Le permis de construire a été délivré en janvier et les premiers coups de pelle pourraient être donnés dans quelques jours, mais, malgré de nombreuses recherches de fonds, on se retrouve face à un sérieux problème de financement», indique-t-il. Sur les 3,7 millions nécessaires à la rénovation des infrastructures, n’ont pu être en effet réunis que 650'000 fr. ainsi qu’un engagement à hauteur de 1,7 million du côté des institutions bancaires. Trop peu. Quant à la nécessité de ces travaux, Adrien Steiger est catégorique: «En l’état, le centre n’est plus viable. Pour emprunter une expression au monde du hockey sur glace: on arrive avec un peu la gueule de bois après cette triste défaite.» 

C’est donc avec quatre scénarios que le Conseil de fondation s’est présenté au Synode de l’EERF, dont des pistes peu crédibles comme «la mise à disposition de fonds propres de 2,4 millions sans remboursement possible» ou «le prêt d’une ou plusieurs paroisses pour 3,7 millions». De fait, le scénario d’une vente du Centre réformé à Ubic Group est apparu pour la majorité de l’assemblée comme la solution la plus «raisonnable». 

«Matelas d’or»?

Cette hypothèse n’en a pas moins fait réagir certains délégués. En question principalement, le prix de vente à 820'000 fr. «N’est-on pas en train de vendre le Centre de Charmey, avec un permis de construire clé en main, pour une bouchée de pain?» interroge Anouk Noyer, déléguée de Môtier-Vully. «Avec cette propriété d'une contenance de 5439 mètres carrés en zone constructible, êtes-vous conscient que nous sommes assis sur un matelas d’or?», interpelle à son tour Walter Schoop, délégué de la paroisse de Fribourg. «Venant du monde de la construction», ce dernier va jusqu’à estimer que cette propriété «dépasse une valeur de plus de 4 millions dans le cadre d'une valorisation».

Sa motion d’ordre demandant à ce que le sujet soit renvoyé au prochain Synode a cependant été largement refusée. Anne-Elisabeth Nobs, vice-présidente du Conseil synodal (Exécutif) rappelle alors rappelé à l’assemblée que cette dernière ne peut que se prononcer sur sa volonté ou non d’exercer son droit de préemption. «Vous n'avez pas le droit de vous prononcer sur le prix de vente ni tout autre détail», recadre-t-elle.

Au moment du vote, la décision était sans appel: 54 délégués ont ainsi renoncé de faire valoir leur droit en rachetant le Centre pour 1 franc symbolique, qui aurait compris la reprise de la dette hypothécaire de 420'000 fr.

«C'est une page qui se tourne. Cette décision était difficile à prendre, je sais que nous sommes nombreux dans cette salle à avoir un passé émotionnel fort avec le Centre réformé de Charmey et j’en fais partie», exprime en conclusion Pierre-Philippe Blaser, président de l’Eglise. Il tient à informer que, comme il lui a été demandé lors d’un précédent Synode, l’Exécutif a bien tenu son engagement de jouer à la loterie pour tenter de réunir les fonds – sans succès. Le Conseil synodal enverra encore quelques recommandations au Conseil de fondation concernant les clauses précises du contrat de vente.